490 av. J.-C. : Victoire des grecs sur les perses. Ces derniers laissent derrière eux un bloc de marbre monumental. Il est à l'origine destiné à accueillir un mémorial à leur triomphe, triomphe qu'ils croient gagné d'avance. Agoracritos y sculpte une statue de Némésis avant que celle-ci ne soit érigée à Rhamnonte. L'intervention de la déesse aurait été déterminante dans l'issue de la bataille.
« Honnêtement ? Je n'ai fait que légèrement désorienter le leader des armées perses. Le reste, les grecs ne le doivent qu'à leur bravoure et leur combattivité. Zeus était également de leur côté, dans l'ombre, puisqu'il a lui-même a attiré mon attention sur cette bataille. Une bien belle victoire pour un bien beau courage. La vaillance des hommes n'avaient d'égal que le pouvoir des dieux. C'était la race des héros, l'âge d'or de l'Olympe et de la terre. Une époque marquée par l'entente entre hommes et dieux, mortels et immortels. Un temps où on croyait encore en nous, un temps où on nous adressait encore des prières à chaque victoire, personnelle ou collective. L'humanité aurait dû continuer dans ce sens. Au lieu de quoi, elle s'est peu à peu perdue dans la haine et la vanité, la cupidité et le dédain. » Némésis.
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An 80 : Un éditeur promet la libération de tout gladiateur qui viendra à bout de son centième combat. Un esclave du nom d'Octavius parvient à s'ériger jusqu'aux quatre-vingt-dix-neuf victoires et s'apprête à entamer son centième et dernier affrontement. L'éditeur le piège : Octavius doit faire face à dix soldats romains dont un officier pour l'emporter. Il prie Némésis, patronne des gladiateurs, avant de livrer bataille. Trois heures et quarante minutes plus tard, il ressort victorieux mais à l'article de la mort. Il vivra quatre jours de liberté.
« Contrairement à d'autres, l'apogée de la Rome m'a été plutôt bénéfique, revigorante même. Les gladiateurs ont trouvé en moi une figure à vénérer et j'ai trouvé en eux l'audace et l'humilité dont commençaient à manquer les hommes. J'ai suivi Octavius dès le début de son entrainement. Il n'avait que sept ans à l'époque. Un esclave parmi d'autres. Tout le long de sa carrière, pas une seule fois il ne manqua de respect à son laniste, éditeur ou adversaire. Pas une seule fois il ne blasphéma ni ne se plaint de son sort. Cette servilité et cette modestie ; cette simplicité, ont été les vraies récompenses. Quand j'ai été témoin de la bassesse de son éditeur et de l'insolence de cet officier romain, je me suis mise dans une colère noire. Et là a été mon erreur. Aveuglée par mon animosité, les romains descendus dans l'arène moururent de l'épée d'Octavius, mais l'officier, dans un dernier soupir, lui asséna un coup fatal. Je le croyais mort, il ne l'était pas. J'ai perdu mon champion à cause de cette rancœur. Mais ses quelques jours de liberté furent néanmoins savourés. Et sa dernière prière, aussi simple et humble qu'il l'était, me fut également adressée. » Némésis.
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21 janvier 1793 : Louis XVI de France est guillotiné suite à l'éclat de la révolution française. Ses abus notoires et ceux de sa femme, Marie-Antoinette d'Autriche, auront conduit à cette exécution. L'orgueil et la vanité lui auront également été fatals.
« Quand nos derniers croyants ont cessé de prier, nous avons rejoint l'Olympe. Il n'y avait plus rien pour elle, pour moi ou pour n'importe quel olympien, nous laissâmes donc l'humanité à son triste sort. Et ce de manière définitive. D'ailleurs, si le VIe siècle marquait le début de la race de fer, le XVIIIe représentait bel et bien son apogée. Le christianisme et le siècle des lumières affaiblirent considérablement les croyances polythéistes. Cependant, cette année-là, Némésis observa le monde des mortels pour constater des dégâts engendrés par la race de fer. Elle disparut du mont Olympe des semaines durant. Nul ne savait où ni pourquoi. Mais à sa réapparition, la révolution avait gagné la France et le roi Louis XVI avait perdu la tête. Elle n'a pas nié son implication. Elle ne l'a pas affirmée non plus. Mais on se doute qu'elle y a joué un rôle, aussi mineur soit-il. Après tout, l'orgueil excessif des rois a toujours eu le don de lui déplaire. » Aidos.
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An 1920 : La bataille de Varsovie, le "miracle de la Vistule", bat son plein. La Pologne part perdante face à la géante URSS. Radzymin et Ossów tombent rapidement. Les polonais sont aculés, leur défaite semble inévitable. Mais ces derniers n'en démordent pas. Les contre-attaques commencent. Ils réussissent à s'emparer de points stratégiques jusqu'à faire reculer l'URSS. La bataille se soldera par un échec russe. C'est un coup dur pour Lénine.
« Elle l'a refait. Némésis a détourné le regard des années durant avant de recommencer son introspection du monde des mortels. Et puis elle a disparu à nouveau, plus longtemps cette fois, avant de réapparaitre. Et comme par hasard, la bataille de Varsovie se solde par la défaite de l'URSS, pourtant certaine de sa victoire. Trop certaine, même. C'est peut-être pour cette raison qu'elle est intervenue. Moi qui la soupçonnait de ne pas beaucoup aimer le leader russe, voila mes doutes fondés. On dirait qu'elle ne peut pas s'empêcher d'intervenir dans les conflits humains. Ils nous ont pourtant reniés, bafoués, oubliés. Et elle continue de leur venir en aide lors de rares occasions. Némésis ne se l'avouera jamais, mais elle croit sans doute plus en la rédemption de l'humanité que n'importe lequel d'entre nous. » Aidos.
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An 2025 : Une pluie de météorites a frappé la terre de part et d'autre. L'Allemagne semble être la plus touchée. L'humanité découvre l'arrivée des Dieux avec stupéfaction, alors que des pouvoirs aux allures divines se manifestent entre les mains des mortels. La colère de l'Olympe s'abat sur le monde. La guerre opposant mortels et immortels débute.
« Les humains, ces êtres grouillants et misérables, doivent apprendre où est leur place une bonne fois pour toute. Comme beaucoup d'autres, Némésis a répondu présente à l'appel. Malheureusement, alors que la plupart ont déjà repris des contacts réguliers, elle semble s'être évaporée dans la nature. Certains disent qu'elle serait apparue en rase campagne, d'autres qu'elle se cacherait parmi les humains. Je le croirai quand je le verrai. Sa trahison me parait presque inconcevable. Némésis a toujours été fidèle à la cause, fidèle à ses convictions et au devoir qui l'incombe. Nous sommes sa famille, je suis son roi. Elle finira par revenir. Nous entendrons bientôt parler de ses exploits. C'est l'implacable, l'inflexible Némésis, après tout. La juste colère des dieux sommeille en elle comme le feu ardent des enfers. Elle ne peut
pas nous trahir. » Zeus.